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Soumission – Michel Houellebecq

Soumission
Genre :
 
roman, anticipation, politique
Auteur : Michel Houellebecq
Année :  2014
Nombre de pages : 320

Résumé : Mouarf, difficile de parler d’un tel livre dans un tel contexte. Assez fan de Houellebecq, j’attendais  son retour impatiemment. Bon, j’avoue que lorsque j’ai vu dans les médias que ça concernait l’islam, ça m’a un peu blasée. Le sujet est tellement kiffé dans la sphère de l’intra-muros qui adore penser observer ses banlieues en cages. Et dans le trou du cul de la France, l’info-tainment fait peur, et la peur est toujours bonne conseillère. Pardon, je m’égare.
Revenons à ce que ça raconte pour de vrai. Le narrateur, après une brillante thèse sur Huysmans, obtient un poste de maître de conférences à La Sorbonne. Sa vie, comme bien souvent chez Houellebecq, est monotone. Bien que son travail sur Huysmans soit brillant et malgré son poste, cet homme, à un étage plutôt élevé de l’ascenceur social, est un pauvre type un peu creux. Son quotidien dans le 15e se compose surtout de plats pré-cuisinés, voire pré-mâchés. Pour ce qui est de l’hygiène, une de ses étudiantes fait souvent l’affaire, en général un intérim qui dure l’année scolaire. Le « héros » essaie bien de nous en raconter quelques-unes, mais on voit bien que c’est pure perte. Elles sont toutes superposables, il n’essaie même pas d’avoir l’idée d’être amoureux.
En fait de héros, c’est plutôt le contexte d’anticipation politique que Houellebecq imagine qui est véritablement le héros. On est à la présidentielle. L’UMPS est agonisant, le FN est assuré d’un second tour. En revanche, un nouveau parti, la Fraternité Musulmane, mené par Ben Abbes émerge. C’est la version « travail, famille, patrie » des temps modernes version purée muslim. Alors, au départ, la nouvelle équation laisse pantois, même les persos du roman. On commence presque dans une ambiance de semi guerre civile : pas d’infos, de la fusillade place Clichy, un second tour saboté…
Le héros, déjà bien déconnecté, essaie de fuir il-ne-sait trop quoi, se retrouve presque à sec sur une aire d’autoroute fusillée. Il squatte dans le coin, un bled semi-paumé. Au bout de quelques jours, la guerre civile n’aura pas lieu. Il rentre sans trop savoir ce qui l’attend. Ben Abbes essaie de reconstruire un nouvel empire romain purée muslim pendant ce temps-là, en remettant la cellule familiale au centre de tout, et l’artisanat comme but ultime du commun des mortels. En attendant, le fric des républiques bananières pétrolières rentre dans les caisses de l’état. La Sorbonne est rachetée par les saoudiens. Notre prof préféré a le choix d’enseigner dans l’université nouvellement islamique ou de prendre une bien trop généreuse retraite. Choix facile, l’oisiveté.
Il peut ainsi observer le pays se transformer lentement mais sûrement, enfin surtout les jupes des filles qui disparaissent pour laisser place à la pudeur. Il observe aussi l’intelligentsia se convertir à tour de bras, non par conviction, mais plus par opportunisme, voire par fainéantise (celui de se trouver une femme par exemple).
Bref, le haut du panier vole bien bas, pragmatique et opportuniste avant tout. N’espérons pas une grande révolution de la part des cerveaux qui sont finalement des couilles molles. En fait, les universitaires ne sont que le pendant des politiques, achetables à loisir par les lobbies.

Ce que j’ai aimé : Bon, ben Houellebecq, on connaît l’équation de ses romans : un pauvre type + un sujet bien sulfureux + un milieu à nous faire découvrir. Comme d’habitude, c’est efficace. Et puis les médias lisant en diagonale, ne retiennent que le sujet bien sulfureux. Alors que le sujet principal, c’est encore et toujours le pauvre type. Je pense que ce mec-là, à force de monomanies romanesques, finira par décrocher le Nobel de littérature. Et puis, Houellebecq arrive toujours à nous faire vivre et à nous détacher en même temps de la décadence occidentale. Il a le regard étrange et pénétrant, ou en tout cas, sa vision me perturbe vraiment et je trouve que son pauvre type, toujours lâche, est un peu de nous tous. Il cède toujours du côté obscur, parce que c’est la voix de la facilité. Ici, Houellebecq nous montre un changement brutal sociétal, mais qui se passe sans bruit, dans l’apathie la plus totale. De la même manière, l’auteur nous montre que les valeurs soit disant républicaines ne signifient plus grand chose pour personne, et qu’il n’y a plus vraiment de valeurs. D’ailleurs, le moindre mec un tant soi peu charismatique et ambitieux réussira à implanter les siennes. Houellebecq me tuera toujours de sa lucidité.
Ce que je n’ai pas aimé : Je suis moins enchantée que lors des Particules Élémentaires. Peut-être parce que la misère sexuelle me parle plus que la religion. Ayant grandi en fin de siècle, j’ai vécu le chemin inverse, du religieux vers l’athéisme, ou plutôt le je m’en foutisme. Pour moi, comme beaucoup de mes contemporains, la religion est quelque chose de moribond, voire qui n’existe presque plus. C’est marrant, mon correcteur a voulu écrire pustule, coïncidence? Je ne pense pas. Force est de constater, surtout depuis Charlie, que ce n’est pas le cas. Je m’en fous, je préfère rentrer la tête dans le sable.
 
Note : 4/5
Plumpy Trash
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La carte et le territoire – Michel Houellebecq

La carte et le territoireTitre Original : La carte et le territoire
Genre :
 
 roman, anticipation, littérature française
Auteur : Michel Houellebecq
Année :  2010
Nombre de pages : 428

Résumé : Il y a quelques mois, WC a lu pour moi « Les particules élémentaires« . Grâce aux WC, j’ai enfin trouvé l’inspiration pour lire un livre de Houellebecq… Livre très juste (il met en scène un scientifique du CNRS… entre autres), très bien écrit, mais ULTRA déprimant… Après une brève période de « Houellebecq, c’est pas pour moi », on m’a conseillée la lecture de « La carte et le territoire ». Je ne voulais pas rester sur une mauvaise impression, même si de fait, Houellebecq n’est pas réputé pour être un écrivain comique… Et voilà, c’est lu! Dans ce livre, on parcourt la vie de l’artiste Jed Martin. Il commence sa carrière en tant que photographe, puis bifurque vers la peinture à l’huile. Il mène une vie calme, parfois on a l’impression qu’il observe sa vie, il passe à côté de l’amour et galère franchement dans ses relations avec son père. On aborde le monde de l’art contemporain et la vie mondaine parisienne. De facon complètement inattendue, Jed aide à résoudre une affaire criminelle, puis se retire de la vie publique jusqu’à la fin de sa vie…
Ce que j’ai aimé : Jed Martin invite l’écrivain Michel Houellebecq à rédiger le livret de sa deuxième grande exposition et en profite pour peindre son portrait! L’auteur s’est habilement intégré à son roman et dresse un (auto)portrait très cynique de sa personne. C’est réussi et il y a même des passages très drôles!
Ce que je n’ai pas aimé : Il y a des passages ultra glauques, mais je réalise maintenant que c’est ca qui fait le charme de Houellebecq!

Note : 5/5
DrTomate
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Les Particules Elementaires – Michel Houellebecq

 

Les particules élémentairesGenre :  roman, littérature françaisebagde
Auteur : Michel Houellebecq
Année :  1998
Nombre de pages : 316

Résumé : Fin des années 60, Jane a deux fils de deux pères différents. Mais elle est trop baba new age pour se laisser bercer par quelque chose d’aussi conventionnel que la maternité. Les deux pères récupèrent les enfants et les font élever par leurs grands-mères respectives, en mode vieille France. Michel et Bruno grandissent alors chacun de leur côté, en ignorant tout de l’autre. Au lycée, coïncidence, ils finissent par se retrouver.
Michel, se lie d’amitié avec la belle Annabelle, mais comme il est incapable de ressentir quelque chose, il passera à côté d’elle. Son cœur vide l’emmènera tout de même à faire une grande carrière scientifique. Quant à Bruno, il sera en permanence en quête du Nirvana sexuel, mais à être un pitoyable raté. Jusqu’à ce qu’il trouve Christiane, qui lui donnera quand même un peu de bonheur, avant de sombrer dans la folie.

Ce que j’ai aimé : Ce livre aborde quelque chose qui est peu évoqué, la misère sentimentale et sexuelle. On l’adore ou on le déteste, cette œuvre a fait scandale lors de sa sortie, je ne sais plus très bien pourquoi.Je l’avais lu à l’époque, et il m’avait beaucoup parlé. Dans notre société qui valorise tellement l’épanouissement dans ces deux domaines, si tu ne rentres pas dans le moule, tu es culpabilisé, mais peu de choses l’évoquent. Que celui qui est célib’ et qui ne zone pas sur les sites de rencontres me jette la première pierre. Presque quinze ans plus tard, je pensais avoir un regard différent sur ce livre, mais pas du tout. J’ai mûri, et ça me fait encore plus de bien de voir que quelqu’un ait abordé ces thèmes, surtout qu’avec l’âge, j’ai découvert que je n’avais pas été la seule dans ce cas.
Et puis c’est « so fin de siècle », la génération désenchantée, fille des soixante-huitards, qui a gagné de nouveaux droits et de nouvelles libertés mais qui doit reconstruire ses repères : « Les enfants, quant à eux, étaient la transmission d’un état, de règles et d’un patrimoine. C’était bien entendu le cas dans les couches féodales, mais aussi chez les commerçants, les paysans, les artisans, dans toutes les classes de la société en fait. Aujourd’hui, tout cela n’existe plus : je suis salarié, je suis locataire, je n’ai rien à transmettre à mon fils. Je n’ai aucun métier à lui apprendre, je ne sais même pas ce qu’il pourra faire plus tard ; les règles que j’ai connues ne seront de toute façon plus valables pour lui, il vivra dans un autre univers. Accepter l’idéologie du changement continuel c’est accepter que la vie d’un homme soit strictement réduite à son existence. » Voilà, ça nous renvoie bien à la vacuité de notre existence. On fait ce qu’on peut pour être heureux, et puis c’est tout, mais c’est aussi un droit à être malheureux.
Ce que je n’ai pas aimé : Rien, je l’ai ingurgité en trois jours.

Note : 5/5
DianaCagothe